Sommet du G8 à Gênes en juillet 2001
Le 2 mars 2004 s’est ouvert à Gênes le procès contre 26 manifestants accusés de « dévastation et pillage » en
rapport avec la révolte contre le G8 de juillet 2001. Et ce n’est que le début, un ballon d’essai en vue d’opérations judiciaires encore plus vastes. Il s’agit d’un procès en tout sens exemplaire : par rapport au type d’accusation (qui a bien peu de précédents dans l’histoire italienne, et qui prévoit plusieurs années de prison), par rapport à la façon dont le pouvoir a préparé le terrain aux jeux et à la vengeance des tribunaux, par rapport aux obstacles que tout mouvement collectif de libération individuelle doit affronter dans les palais comme dans la rue.
Préparé par 20 arrestations ordonnées par le parquet de Cosenza en novembre 2002 et par 23 autres effectuées
peu après par celui de Gênes, ce procès veut adresser un message clair à tout le monde : l’émeute gênoise aura ses boucs émissaires. Il est plutôt évident que l’enjeu dépasse la révolte de juillet pour projeter son ombre funeste sur le futur. On peut prendre comme exemple l’initiative du parquet de Gênes qui a acheté une page entière du quotidien de la Ligurie, Il secolo XIX, afin de publier les images -prises à partir d’une caméra de vidéosurveillance- de deux manifestants en vue de les identifier. Pour l’occasion, le délit de « complicité psychique » a refait son apparition publique : l’Etat affirme ainsi qu’il n’est pas nécessaire de participer directement à des actions de révolte pour connaître les faveurs de la répression, mais qu’il suffit simplement pour cela d’être présent là où elles se déroulent sans empêcher les autres de les accomplir. Bref, sans se transformer en flics. Pour avoir un tableau encore plus précis, ajoutons qu’une offre -d’ailleurs aussi classique qu’indécente- avait été adressée de façon explicite et avec un certain succès aux interpellés de Cosenza : l’ « abjuration de la violence » en échange de leur sortie de prison. Ce qui est en cause, ce n’est pas telle ou telle action, tel ou tel sabotage, mais bien l’attitude face aux institutions et, plus généralement, le refus même de l’ordre social et de la vie de sujet qu’il impose. Collabo ou ennemi, voilà l’ultimatum que l’Etat lance à tout un chacun.