[25 Jun 2005] QUITO (AFP)
Un mouvement de protestation pacifique suivie par près de 90% des détenus d’Equateur qui réclament notamment des réductions de peines, s’est radicalisé avec des crucifiements symboliques de prisonniers, a indiqué vendredi un porte-parole des protestataires.
Six prisonniers, parmi lesquels trois étrangers accusés de trafic de drogue (une Brésilienne, un Chilien et un Colombien), ont été attachés sur des croix jeudi dans deux prisons du port de Guayaquil. Deux d’entre eux poursuivaient leur action symbolique vendredi, a affirmé Washington Grueso.
"Nous avons commencé une étape de crucifiements dans tous les établissements pénitentiaires pour exiger au Congrès un changement radical dans le système des peines", a-t-il poursuivi.
"Ce week-end nous n’allons pas recevoir de visites. Les mesures se radicaliseront et probablement nous allons avoir besoin de l’aide du Comité International de la Croix Rouge", a-t-il poursuivi.
Le détenu chilien, Daniel Pentenero, qui observe également une grève de la faim, a été crucifié avec des clous. "Cela a été un crucifiement véritable", a dit le représentants des prisonniers.
Certains sont allés plus loin en se cousant la bouche, affirme-t-il.
Les détenus qui entendent également protester contre le surpeuplement dans les prisons équatoriennes, ont entamé leur mouvement lundi et contrôlent sept prisons, dont les deux plus grandes à Quito et Guayaquil.
Les autorités ont renforcé la sécurité autour des établissements pour éviter toute évasion.
Une réunion jeudi entre le ministre de l’Intérieur, Mauricio Gandara, et des représentants des détenus n’a rien donné.
"On n’a pas pu conclure un accord parce que le gouvernement n’a pas de politique de réinsertion", a déclaré M. Grueso.
Selon ce dernier, le ministre "s’est limité à demander la fin du mouvement de protestation" sans rien offrir en échange. "Nous n’allons pas céder tant que le Congrès ne fera pas d’avancée sur une réduction des peines", a-t-il poursuivi.
Le Congrès est réuni depuis jeudi pour débattre d’une réforme du système des peines en Equateur.
Selon le porte-parole des détenus, l’adoption par le pouvoir législatif d’un amendement sur ce sujet permettrait de réduire la tension, même s’il existe d’autres revendications concernant le surpeuplement, la réinsertion et la corruption au sein du système pénitentiaire.
Selon M. Grueso, les 34 prisons d’Equateur hébergent 11.650 personnes pour une capacité de 6.500 places.
Les détenus réclament également la libération de ceux qui, dans l’attente de jugement, sont emprisonnés depuis plus d’un an, soit environ 65% de la population carcérale, affirme M. Grueso, selon lequel les trois étrangers qui ont été crucifiés se trouvent dans ce cas.
"La compagne brésilienne est détenue depuis un an et demi, le Chilien deux ans et le Colombien un an et neuf mois", a-t-il dit.
Ces questions ne cessent d’agiter les prisons équatoriennes, qui se soulèvent régulièrement.
En avril 2004, une mutinerie d’une semaine dans la principale prison de Quito, dans le centre colonial, avait fait deux morts et 20 blessés à l’issue d’une semaine qui avait vu les détenus prendre en otages quelque 360 personnes.
En décembre dernier, le même établissement avait été le théâtre d’une prise en otages de 226 personnes par des détenus, qui réclamaient des réductions de peines et une solution au surpeuplement.