Cette décision est scandaleuse. Légalement, ou pour mieux dire selon leurs
propres lois, Filipe a le droit d’être libéré. Aujourd’hui, c’est plus
clair que jamais après tous les hauts et bas que ce dossier a connus :
l’État français retient Filipe Bidart en otage. Ce qu’ils essayaient de
cacher derrière un discours juridique hypocrite apparaît en pleine
lumière : ils veulent l’utiliser politiquement, c’est une décision purement
politique. Tous leurs faux arguments ne parviennent pas à cacher la
cruelle réalité, ce qu’ils reprochent à Filipe, c’est de faire partie du
Collectif des Prisonniers Politiques Basques, c’est son engagement et la
dignité qu’il a toujours su maintenir face à eux.
La nouvelle loi antiterroriste de Sarkozy, votée en décembre 2005 et mise
en vigueur au mois de mai dernier a été appliquée à Filipe. Cette loi
entraîne un certains nombre de changements, parmi lesquels la
centralisation à Paris du suivi des prisonniers condamnés en relation avec
des affaires basques. Jusqu’alors, c’était le Juge d’Application des
Peines de l’endroit où se trouvait la prison qui gérait ce suivi
(traitement des remises de peine, demandes de libération conditionnelle...).
Tout cela est maintenant contrôlé depuis Paris.
Ce qui arrive à Filipe n’est malheureusement pas un cas isolé. Il y a 160
prisonniers politiques basques dans le même cas, qui ne peuvent recouvrer
la liberté bien qu’ils en aient le droit, 6 gravement malades et 150 qui
ont fini leur peine et qui sont quand même maintenus derrière les
barreaux. En ce moment politique particulier, les deux États en font
l’objet d’un chantage afin de faire pression sur Euskal Herria.
L’État français dit qu’il n’a rien à voir avec le conflit politique, mais
il créé de nouvelles lois pour agir contre Euskal Herria, et il oriente
les décisions judiciaires dans le sens d’une plus grande souffrance.
L’État français est totalement impliqué dans ce conflit, il refuse
simplement de l’admettre pour le moment et donc de participer au processus
démocratique. Un État qui refuse de parler et qui durcit ses lois est un
État qui prépare la confrontation au mépris du dialogue, avec, encore une
fois, toute la souffrance humaine que ce choix comporte. Tôt ou tard, cet
État devra prendre part à ce processus. Un processus définitif devra
forcément prendre en compte Euskal Herria dans sa totalité et devra
forcément garantir les droits de tous, sans quoi il restera partiel et ne
sera pas acceptable.
C’est la seule façon de parvenir à une véritable solution pour tous. Et
nous le savons bien, cela ne nous tombera pas du ciel. Ce qu’ils
recherchent avec de telles décisions, c’est notre découragement et notre
désespoir. Nous voulons souligner, plus que jamais, l’importance de la
mobilisation pour que les deux États entendent enfin la voix de la raison.
Euskal Herria, le 17 octobre 2006