COLOMBO (AFP) - Le Sri Lanka a été frappé lundi par le pire attentat suicide de son histoire avec au moins 103 personnes tuées et plus de 150 blessées dans une attaque au camion piégé implicitement revendiquée par les rebelles tamouls.
L’armée sri-lankaise a répliqué avec des bombardements aériens en profondeur sur les territoires contrôlés par les Tigres de libération de l’Eelam tamoul (LTTE), ont indiqué les rebelles, tandis que le ministère de la Défense annonçait dans la soirée la perte d’un avion militaire au cours d’une "mission d’entraînement".
Bourré d’explosifs, un camion dont il ne reste plus que le châssis, a sauté près d’une vingtaine d’autobus où attendaient 340 marins sri-lankais se rendant au front ou en revenant, dans le district de Trincomalee, à 170 km au nord-est de Colombo.
Selon la police, l’attentat pourrait avoir touché des dizaines de petits marchands de boissons ou de confiseries présents sur les lieux.
Cette "attaque barbare contre des marins sans armes" prouve que le LTTE n’a aucun intérêt à faire la paix, a estimé le porte-parole du gouvernement pour la Défense, Keheliya Rambukwella.
Le gouvernement s’est déclaré "profondément choqué" par cet attentat, dans un communiqué.
De son côté, sur un site internet proche du LTTE, un porte-parole des Tigres, Rasiah Ilanthiriyan a, à demi-mots, reconnu la responsabilité du mouvement dans cette opération : "quand l’aviation sri-lankaise continue de bombarder des cibles tamoules, comment pourrait-on s’attendre à ce que les Tigres se retiennent de viser des installations militaires" ennemies, a-t-il commenté.
Cette attaque suicide est la pire de tous les attentats de ce type au Sri Lanka.
En 1987, les Tigres avaient commis leur premier attentat suicide au camion piégé, tuant 40 soldats. Jusqu’à lundi, le plus grave attentat suicide avait tué 91 personnes et blessés 1.400 autres en 1996 près de la banque centrale de Colombo.
Le Sri Lanka est victime d’un nouveau bain de sang alors que le gouvernement et les rebelles étaient convenus de se retrouver en Suisse le 28 octobre pour rouvrir des négociations de paix.
Déjà mercredi, 133 militaires et 22 insurgés tamouls avaient trouvé la mort dans une offensive de l’armée, qui a tourné à la débâcle en seulement deux heures, dans le nord de l’île.
Quelque 515 soldats avaient été blessés dans cette bataille qui constitue la plus lourde perte militaire pour le Sri Lanka depuis 2002.
Pour tenter de sauver le processus de paix, l’émissaire japonais Yasushi Akashi a rencontré lundi le président sri-lankais Mahinda Rajapakse. Il devait aussi s’entretenir avec des responsables de la guérilla tamoule.
La Norvège doit aussi renvoyer son négociateur, Jon Hanssen-Bauer, qui s’efforce depuis des semaines de ramener les deux camps à la table des pourparlers de paix.
Le secrétaire d’Etat adjoint américain pour l’Asie centrale et du Sud, Richard Boucher, est également attendu à Colombo, jeudi.
Les Tigres se battent pour l’autonomie du nord-est de l’île.
Mais la Cour suprême du Sri Lanka a ordonné lundi la division en deux morceaux de la grande province du Nord-Est sur laquelle les Tamouls exercent une autorité de facto.
La création de cette grande province d’un seul tenant avait été acceptée lors d’un accord de paix entre le gouvernement et les rebelles en 1987. Sa division en deux entités risque d’attiser encore un peu plus les tensions entre la guérilla et le pouvoir central de Colombo.
Depuis le début en 1972 de l’insurrection tamoule, plus de 60.000 civils et militaires ont été tués.
Plus de 2.300 personnes ont trouvé la mort dans des affrontements entre les deux parties depuis décembre 2005.