MADRID (AFP) - Douze personnes ont été interpellées mardi à l’aube en
France et en Espagne à l’issue de deux ans d’enquête d’une équipe
franco-espagnole sur le financement de l’organisation séparatiste basque
ETA.
Cinq personnes ont été interpellées en Espagne et sept en France, dont
l’un des fondateurs de l’ETA en 1959, Julen Madariaga, 73 ans, qui
assurait militer aujourd’hui à Aralar, une scission non violente de
Batasuna, bras politique de l’ETA.
Parmi les suspects arrêtés en France figure aussi le présumé chef du
réseau d’extorsion, Angel Iturbe Abasolo, 53 ans, frère de Domingo Iturbe
"Txomin", chef suprême de l’ETA au milieu des années 80 et qui à ce titre
fut l’interlocuteur désigné par l’ETA pour des négociations menées avec le
gouvernement espagnol à Alger en 1986.
Les sept arrestations en France (cinq hommes et deux femmes) se sont
produites dans le département des Pyrénées Atlantiques (Pays basque
français), limitrophe de l’Espagne, notamment à Bayonne, Biarritz, Ascain,
Hendaye, Arcangues et Saint-Pée-sur-Nivelle.
L’opération est coordonnée par le juge espagnol Fernando Grande-Marlaska
et par la juge française Laurence Le Vert, dans le cadre d’une instruction
ouverte en 1998 en Espagne, a-t-on appris de source judiciaire espagnole.
Selon la même source, les douze suspects seraient des intermédiaires dans
le circuit de collecte de "l’impôt révolutionnaire", le système
d’extorsion de l’ETA, qui fonctionne essentiellement auprès des
entrepreneurs du Pays basque et de Navarre (nord de l’Espagne).
L’opération a permis de démanteler le coeur de l’appareil de financement
de l’ETA, ont assuré des sources anti-terroristes. Elle est le résultat de
deux ans d’investigations d’une "Equipe conjointe d’enquête", un outil
anti-terroriste créé en 2004 par la France et l’Espagne.
Le ministère espagnol de l’Intérieur affirme que "l’appareil démantelé
fonctionnait depuis 20 ans dans la gestion et le recouvrement de ’l’impôt
révolutionnaire’".
Un total de 14 perquisitions étaient en cours mardi en Espagne notamment à
Irun (Pays basque) et Alicante (sud) et six en France. Des biens d’une
valeur totale de 700.000 euros ont été placés sous séquestre, dont un
hôtel, ainsi que plus de 50 comptes bancaires en Espagne et en France
Cette opération intervient alors que le chef du gouvernement espagnol,
José Luis Rodriguez Zapatero, s’apprête à annoncer le début de
négociations avec l’ETA dans le cadre du processus de paix ouvert par le
cessez-le-feu permanent décrété par cette organisation le 22 mars.
Le ministre espagnol de la Justice, Juan Fernando Lopez Aguilar, a assuré
mardi que l’opération "démontrait que les institutions de l’Etat chargées
des réseaux terroristes fonctionnaient normalement".
L’opération policière "n’altère en rien le parcours dont est responsable
le gouvernement pour mettre à profit une occasion historique de mettre un
point final à la violence de l’ETA et à ses manifestations d’intimidation,
comme l’extorsion", a-t-il ajouté, en référence au processus de paix.
L’organisation indépendantiste armée Euskadi Ta Askatasuna (patrie basque
et liberté) est tenue pour responsable de la mort de plus de 800 personnes
depuis 1968.