A Bruxelles le dimanche 2 juillet 2006 à 15h
Porte de Hal à Saint-Gilles
Début mars 2006, le "Groupe de Soutien aux Ringolévios dans les prisons
belges" commence son activité par des distributions de tracts devant 3
prisons bruxelloises (Forest, Saint-Gilles et Berkendael) une fois par
semaine en solidarité avec les détenus d’Ittre. En effet, le 7 mars, suite
aux tabassages d’un jeune détenu, une vingtaine de prisonniers refusèrent de
retourner dans leurs cellules. En réponse aux revendications, la direction
envoie une trentaine de matons casqués et armés pour casser les cinq
prisonniers qui n’étaient pas remontés malgré les menaces des matons.
Ces tractages devant les prisons ont permis de diffuser l’info et de prendre
des contacts avec les familles et amis des prisonniers. Des tractages ont
également eu lieu devant les prisons de Gand, Anvers et Ittre. Début avril,
le Groupe de Soutien lance une campagne d’affichage à Louvain, Anvers,
Bruxelles, Tubize, Ittre, Nivelles, Arlon et Gand. L’info sur les
tabassages, les mauvais traitements et la torture circule aussi à
l’intérieur des murs.
Le 23 avril, une émeute éclate à la prison de Mons ; plus de 45 détenus
refusent de remonter dans leurs cellules, occupent le préau et se défendent
comme ils le peuvent contre les attaques des flics. L’émeute est matée, mais
la police compte 12 blessés... Le 16 mai, les matons de la prison de
Nivelles entrent en grève. La réponse des détenus face à cette nouvelle
dégradation programmée des conditions de détention vient moins d’une heure
plus tard : le toit de la prison est incendié, une aile complète sera
détruite par le feu. La police fait appel à l’armée et aux Escadrons
Spéciaux pour rétablir l’ordre.
Maintenant il pleut des préavis de grève des matons. Les grèves de matons se
déclarent pour un oui ou pour un non : évasion, révolte, critique de
l’extérieur, plaintes des détenus contre les violences des matons,
émeutes,... Ces grèves à répétition sont un des problèmes qui polluent le
débat sur la situation dans les prisons . Mais que réclament les matons ?
Plus d’effectifs, plus de prisons (en Belgique il y a maintenant 8000 places
pour 10 000 détenus, le plus grand nombre depuis des décennies), la
suppression des conditionnelles. Tout cela en argumentant que c’est pour le
bien de la société et ... des détenus ! Mais leurs arguments sont
contradictoires, et ne posent pas le problème dans le bon sens. Il n’y
aurait pas assez de places dans les prisons ? Mais, en même temps, l’idée de
la liberté conditionnelle est attaquée depuis des années entre autre par les
syndicats des matons.
En plus des actions des prisonniers, nous appelons à une manifestation
nationale de solidarité pour soutenir leurs revendications :
Halte à la violence des matons, aux humiliations et aux brimades.
Démission des matons connus pour leur violence.
Suppression de toutes les formes d’isolement.
Démarrer automatiquement la procédure pour la libération conditionnelle au
1/3 de la peine pour tous les détenus
Accès aux autres demandes des détenus : la diminution des frais de
téléphone, des prix de la cantine, liberté d’organisation pour les détenus
(par exemple, création des comités de détenus), meilleure bouffe,...
Nous demandons à tous ceux et à toutes celles qui soutiennent ces
revendications de participer à la manifestation de solidarité et de
développer la solidarité dans la rue avec tous les détenus en lutte . Et
quelques soient nos idéaux, nous pouvons agir qu’à partir des situations
concrètes.
Ce n’est pas parce que nous soutenons les revendications des prisonniers,
que nous nous révoltons contre les tabassages et les conditions de
détentions que nous luttons pour autant pour une « humanisation des prisons
». Les tabassages (même s’ils ne sont pas commis par tous les matons) et les
conditions de détentions ne doivent pas être vus comme de simples
irrégularités ou dysfonctionnements. Il ne s’agit pas de maladies que la
prison elle-même pourrait endiguer à coup de réformes et de refinancements.
Vouloir améliorer la prison, c’est encore rêver à une prison idéale. Or
qu’est-ce qu’une prison ? Un lieu où « on paye pour une faute », où « on
remet sur le droit chemin » (à coup de matraques s’il le faut), où on
discipline, où on dresse ceux qui constituent une « menace réelle » pour la
société et son ordre politique, économique et moral. Essayer d’améliorer la
prison, c’est reconnaître une légitimité au pouvoir qui les construit pour
se renforcer (et en mettant en place tout un appareil policier et pénale).
Nous voulons avancer un autre point de vue qui est l’abolition de la prison.
Premièrement, parce que la prison est un instrument de l’État pour détruire
les conflits sociaux et la lutte sociale (pauvre contre riche ; opprimé
contre oppresseur) dans son propre intérêt. Parce que les prisons servent à
isoler et briser les personnes qui réagissent face à l’impuissance dans
laquelle les plongent l’organisation de cette société et qui s’organisent
pour lutter à leur manière contre le fatalisme de la misère généralisée.
En deuxième lieu, la prison n’est jamais une solution, même s’il s’agit de
régler des problèmes de la vie quotidienne (par exemple, les agressions
sexuelles) que rencontrent tous et toutes. En effet, l’appareil de punition
de l’État nous prive de la responsabilité et de la liberté nécessaires pour
résoudre ces problèmes nous-mêmes.
En troisième lieu, la prison est une réflexion microscopique et concentrée
de la domination, de l’augmentation du contrôle et de la discipline dans la
société.
La prison est une institution où l’on prive les détenus de leur liberté,
mais aussi de leur individualité et de leur volonté. C’est un système de
discipline, forcé d’une part par la violence et la menace avec violence, et
d’autre part par une hiérarchie stricte des faveurs et soumission. Par
exemple, pour pouvoir acheter des aliments, il faut de l’argent. Pour avoir
de l’argent, les plus favorisés et soumis peuvent travailler ; cela dépend
entièrement de la décision et de la faveur des matons et de la direction
pénitentiaire.
Dans ce sens, la prison se diffuse à tous les niveaux de la société :
concrètement, par exemple l’instauration des bracelets électroniques et de
la résidence forcée ainsi que l’augmentation du nombre de flics dans la rue,
de vigiles dans les supermarchés et devant les portes des écoles, de caméras
et de développements technologiques de pointe comme la carte d’identité à
puce (et son évolution probable, la puce d’identité sous-cutanée), le
passeport biométrique, la surveillance vidéo par satellites (allez voir le
toit de votre maison sur Yahoo), autant de dispositifs permettant à l’État
de nous surveiller partout et à tout moment .
La chape de béton qui étouffait les cris des prisonniers depuis plusieurs
années commence à se fissurer. Il est temps de s’y insinuer pour que ces
cris parviennent enfin aux oreilles de tous et de toutes et pour faire
éclater les murs de toutes les prisons. Une première manifestation de
solidarité pour briser le silence autour de la situation dans les prisons,
des positions des détenus et des nôtres peut nous servir de "dynamite".
La lutte contre la prison commence avec le développement de la solidarité
avec les détenus ici dans la rue.
SOLIDARITE AVEC LES PRISONNIERS EN LUTTE
RASONS LES MURS
LIBERTE POUR TOUS ET TOUTES LES DETENU(E)S