mercredi 17 mai 2006, 8h09
Par Isabelle HOURCADE
SAO PAULO (AFP) - Le bilan officiel de quatre jours d’offensive du crime organisé a atteint 133 morts dans l’Etat de Sao Paulo après de nouveaux affrontements et la découverte de victimes dans les prisons à l’issue des mutineries, alors que le calme semblait de retour mardi soir.
Selon le dernier bilan diffusé mardi à la mi-journée par le secrétariat à la sécurité de Sao Paulo, les attaques ont fait 115 morts (40 policiers, 71 assaillants et 4 passants) au cours de 251 actions contre les forces de l’ordre et des objectifs civils depuis vendredi soir.
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Les forces de l’ordre ont arrêté 115 assaillants présumés et ont saisi 113 armes, a précisé le secrétariat.
Par ailleurs, les corps de 18 détenus ont été retrouvés dans les prisons après la fin des mutineries. Huit prisonniers auraient été asphyxiés dans l’incendie d’une prison par leurs codétenus, a indiqué à l’AFP un porte-parole de l’administration pénitentiaire.
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Un certain retour au calme semblait toutefois s’imposer mardi à Sao Paulo.
Deux autobus ont été incendiés dans la journée, mais ces attaques ont été attribuées par la police à des propriétaires de minibus clandestins sans liens avec les organisations criminelles tentant de profiter de la confusion.
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Le gouverneur de l’Etat de Sao Paulo Claudio Lembo a de nouveau démenti mardi toute tractation avec le chef de l’organisation criminelle Premier Commando de la Capitale (PCC), Marcos Camacho, dit Marcola, considéré comme l’un des chefs d’orchestre de l’offensive. "Il n’y a pas eu de dialogue avec les dirigeants en vue d’un accord", a-t-il dit.
Le secrétariat à l’administration pénitentiaire Nagashi Furukawa a reconnu qu’une rencontre dimanche entre une avocate, le chef du PCC et des représentants des autorités, avait contribué à diminuer les attaques du crime organisé. La rencontre visait selon lui à rassurer les membres du PCC en dehors de la prison sur l’état de santé de leur chef, alors que des rumeurs faisaient état de blessures.
Pour le quotidien O Estado de Sao Paulo, Marcola aurait donné l’ordre à ses troupes de mettre fin aux attaques après avoir rencontré dans sa prison des représentants du gouvernement local.
Lundi soir l’administration pénitentiaire de l’Etat de Sao Paulo avait annoncé la fin négociée, sans victimes ni intervention de la police anti-émeutes, de toutes les mutineries dans les prisons et la libération de 195 otages.
Le mouvement coordonné de rébellion lancé vendredi soir a touché jusqu’à 73 établissements carcéraux depuis le début de l’offensive du crime organisé contre la police et l’administration pénitentiaire, en représailles contre le transfèrement de 765 détenus vers une prison de haute sécurité.
Quinze prisons ont subi des destructions telles que l’administration pénitentiaire peinait à restaurer un semblant d’autorité, selon M. Furukawa.
Les habitants de Sao Paulo, sous le choc des violences des derniers jours, ont tenté mardi de reprendre une vie normale, mais l’affluence est restée limitée dans le centre. De nombreuses écoles et universités ont préféré ne pas ouvrir leurs portes pour raisons de sécurité.
Les compagnies d’autobus paralysées la veille ont circulé sous escorte policière, après que 80 véhicules eurent été incendiés la nuit précédente.
"Les gens ont peur, ceux qui pouvaient éviter d’aller travailler n’y sont pas allés", indiquait en début de journée un employé d’une compagnie d’autobus à l’AFP.
"Tout le monde a peur ici, les gangsters font ce qu’ils veulent, on se croirait en Irak, c’est terrifiant. Les gens ne savent pas ce qui peut se passer et où", déclarait Bety, une résidente d’un quartier est de Sao Paulo.
La veille, les habitants de Sao Paulo avaient déserté en masse les bureaux et commerces du centre ville en tout début d’après-midi dans un mouvement de panique alimenté par des rumeurs d’attaques imminentes propagées par mail.
Selon l’Association commerciale de Sao Paulo, les ventes du commerce ont chuté lundi de 90%.
Plus de 200 km de bouchons se sont formés, avant que la grande métropole sud-américaine ne se transforme en une ville fantôme aux rues désertes, où bars et restaurants étaient fermés.