jeudi 23 février 2006, 10h47
PARIS (AFP) - Jean Castela et Vincent Andriuzzi ont été acquittés mercredi en appel de l’assassinat du préfet de Corse Claude Erignac, en 1998, par la cour d’assises spéciale de Paris qui les a en revanche condamnés pour trois séries d’attentats commis en 1994.
Ces deux enseignants, que l’accusation avait présentés comme les "intellectuels" commanditaires de l’assassinat, avaient été condamnés en première instance à trente ans de réclusion, en juillet 2003.
Castela, un agrégé de géographie de 46 ans, et Andriuzzi, professeur de mathématiques âgé de 50 ans, avaient fait appel. Ils n’ont jamais cessé de clamer leur innocence.
Les juges en appel les ont entendus et n’ont pas suivi les réquisitions de trente années de réclusion réclamées par le parquet général qui les avait présentés comme "les théoriciens" de l’assassinat du préfet, commis le 6 février 1998 à Ajaccio.
La défense s’était attachée pendant les trois semaines d’audience à démonter l’accusation et les conditions troublantes dans lesquelles l’enquête a été menée par la police antiterroriste.
Elle avait notamment mis en avant un procès verbal antidaté de la Division nationale antiterroriste (DNAT), qui était une des pierres angulaires de l’accusation.
Le président de la cour, Jean-Pierre Getti, avait parlé de "PV problématiques" et de "légèretés" procédurales.
"L’institution judiciaire n’a pas loupé son rendez-vous avec la justice", s’est félicité Me Eric Dupont-Moretti, un des avocats de Castela. "L’acquittement de Castela et Andriuzzi n’est pas une victoire de la défense, c’est la moindre des choses parce qu’il y n’avait rien contre eux."
La cour a en revanche retenu la culpabilité des deux hommes dans un volet secondaire du dossier : trois séries d’attentats commis sur le continent en 1994 contre des établissements publics de Mende, Nice et Paris.
Castela a reconnu avoir rendu des "services" au mouvement terroriste corse FLNC en consignant des informations sur un carnet trouvé chez lui et qui a servi pour des repérages d’attentat. Il a été condamné à dix ans de réclusion criminelle.
Andriuzzi, qui a toujours nié en bloc les faits, a été reconnu coupable de complicité de ces actions terroristes. Il a été condamné à huit ans d’emprisonnement.
Compte tenu de leur temps passé en détention provisoire -sept ans et trois mois pour Castela, six ans et neuf mois pour Andriuzzi- les deux hommes pourraient sortir prochainement de prison.
"C’est une question de jours", a déclaré Me Dupont-Moretti qui a indiqué que devrait notamment s’écouler le délai légal de cinq jours pour le pourvoi en cassation.
"Bientôt, ils vont rejoindre leur île, leur peuple, leur montagne, leur culture", a assuré Me Vincent Stagnara, autre défenseur de Castela, sous les applaudissements des proches des deux hommes.
Le verdict a été accueilli avec un grand soulagement par les familles des accusés, entourées de nombreux proches dans la salle d’audience.
"On va rentrer à la maison tous ensemble, on va recommencer à vivre, on va oublier les prisons, les parloirs", a déclaré Rose-Marie Andriuzzi, très émue au côté de sa fille.
"Ca y est, on a enfin eu une justice équitable mais je me dis que sept ans ont été perdus", a dit Stella Castela.