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Publiée le 27 novembre 2005

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« Cette évasion pour nous, c’était une bouffée d’oxygène... » (Libération)

Jeudi a débuté à Paris le procès des auteurs et complices présumés d’une tentative d’évasion de la centrale de Moulins-Yzeure en 2003 • Dans le box : les braqueurs Michel Ghellam et Jean-Christophe Pedron et Régis Schleicher, ancien membre d’Action directe •

Par Dominique SIMMONOT

27 novembre 2005 (Liberation.fr - 15:53)

c’était le 12 février 2003, au centre socio-culturel Baudelaire de la prison de Moulins-Yzeure (Allier). La centrale est réputée pour son système, on la dit « la plus sécuritaire d’Europe ». Ici, se purgent de très longues peines. Le surveillant Moreno prend son service, seul, il est environ 8h. Michel Ghellam toque à la porte. « Je n’ai rien remarqué de spécial, a raconté le surveillant aux policiers, sauf qu’à la réflexion j’ai trouvé curieux que Ghellam demande l’ouverture de l’atelier peinture, alors qu’il n’est pas peintre. Et puis il portait un pantalon alors qu’habituellement, il est en short ». Moreno se rend à son bureau inscrire l’arrivée de Ghellam. Dix minutes plus tard, Régis Schleicher frappe à son tour à l’entrée du « socio », comme disent les détenus. Puis c’est Jean-Christophe Pedron qui entre. Et Ghellam a surgi avec une arme de poing, un Glock 9mm. « Bouge pas ! Crie pas ! Tout se passera bien ! » « Déconnez pas, j’ai une gamine ! », supplie le surveillant.

Trois ans après une spectaculaire belle par hélicoptère (« Libération » du 10 juin 2000), la tentative d’évasion a commencé. Le surveillant est ligoté avec du large ruban adhésif. Pedron lui bouche les oreilles avec ses pouces. Deux explosions. La porte du « socio » saute. Voilà les trois qui courent sur une terrasse. Depuis un mirador, un surveillant ouvre le feu. Pedron tombe, blessé au bras. Cinq minutes après, Ghellam et Schleicher lèvent les bras en l’air, ils se rendent.

Les voilà, jeudi, tous les trois dans le box de la 16ème chambre du tribunal correctionnel de Paris. Des « RCP », réclusion criminelle à perpétuité. De gauche à droite, Ghellam, le braqueur, 46 ans et déjà condamné pour une tentative d’évasion de Clairvaux. Un moustachu aux gros biceps. Un beau parleur aussi, qui se défend tout seul. Régis Schleicher, 48 ans, un ancien d’Action directe qui porte son tee-shirt noir, signé rouge « Vive la liberté ! » et qui sourit à ses copains, qui dans la salle, arborent le même tee-shirt que lui. Jean-Christophe Pedron, 36 ans, un braqueur, crâne rasé, mains jointes sur la poitrine.

Ce procès, ils veulent que ce soit celui de la prison et des longues peines. Et, c’est étrange, ils rigolent. Me Jacques Vergès, l’avocat de Schleicher, avait confié avant l’audience : « Les faits, je vous le dis, Régis et moi on s’en fout ! Etant donné les conditions de détention, la longueur des peines, il existe un devoir de s’évader ! ». Et Schleicher raconte au président. « En 1997, à la centrale de Clairvaux, j’ai fait l’objet d’une tentative d’assssinat (il a été grièvement blessé à la tête à coups de barre de fer, NDLR) et à l’origine l’on a retrouvé un membre de l’administration pénitentiaire. En 1999, ayant achevé ma période de sûreté, j’étais théoriquement proposable pour une libération conditionnelle, mais le greffe avec les procureurs et le juge de l’application des peines ont décidé que pour moi, les périodes de sûreté se cumulaient, c’était une aberration juridique, mais on a mis du temps à le faire juger. En 2001, un magistrat s’est permis de mettre en cause mon avocat, Me Vergès. Alors, j’ai compris que la libération conditionnelle me serait toujours refusée, et j’ai fait savoir dans la prison que j’étais candidat à cette évasion... ». Pedron résume : « Les prisons sont des mouroirs, cette évasion pour nous, c’était une bouffée d’oxygène... ».

Malgré cela, les faits aussi sont l’occasion de pointer des zones peu explorées de l’enquête. « Elle n’a pu déterminer les conditions d’entrée des armes et des explosifs, les éventuelles complicités internes ou externes (autres que celles des mis en examen) n’étant pas élucidées », est-il écrit dans le réquisitoire. Alors comment ? Car les trois étaient en possession de six détonateurs, trois pains d’explosifs, sans compter le Glock et douze cartouches 9mm. Et puis un portable et sa puce que Ghellam a tenté de machouiller pour la détruire avant sa reddition. Voilà l’explication de Ghellam : « En prison, circule beaucoup de matos. On sait qui vend ceci ou cela... ». Selon lui, une fouille générale devait avoir lieu le 14 février, « certaines personnes m’ont proposé les explosifs et l’arme, alors j’ai fait le tour des candidats à cette évasion, c’était le jour ou jamais, sinon tout cela aurait été perdu.... C’était dommage... ». Certaines personnes, mais qui ?, veut savoir Etienne Fradin, le président. Et les prisonniers, sans répondre, prennent des airs mystérieux. Les explosifs étaient cachés dans la trappe des toilettes et dans les enceintes audio d’une salle du « socio ». Me Vergès sourit aux juges : « Je vous demande de noter que les explosifs se trouvaient dans une salle qui n’était accessible qu’aux gardiens. Ces derniers n’ont même pas été interrogés... Révélateur, non ? ». Et l’arme ? En pièces détachées ? Malgré les portiques de sécurité ? Pas facile, mais possible selon l’enquête, tant le portique semble sonner de manière aléatoire. Sur les tirs des surveillants, l’enquête a été assez succinte. Ghellam : « Ils nous ont tiré dessus à maintes reprises, j’ai entendu les balles siffler à au moins dix reprises ». Pedron : « Il m’a tiré à la tête, atteignant mon bras, puisque j’avais les bras en l’air. Et voilà... C’est des gens, on leur tire dessus, on essaye de les tuer, il n’y a pas de balistique ! C’est rien, c’est normal, c’est la France ! ». Schleicher, lui ne dit rien. « Je joue le rôle du prévenu taisant puisque le tribunal a refusé d’auditionner ce surveillant ».

Et ce portable ? Ghellam hausse les épaules : « il y en plein qui circulent dans toutes les prisons. C’est un petit espace de liberté, un moyen de communiquer un peu avec l’extérieur ». Ce portable lui a servi à téléphoner à sa femme Marie. Mais aussi à son avocate Françoise Luneau avec qui il avait lié des relations particulières. Elle comparait pour complicité. Libre, après un an de prison, assise sur le même banc que Marie Ghellam. Le procès se tient sur deux semaines, en quatre jours, les jeudi et vendredi.

(1) témoignages dans Libération des 3 mai 2003 et 28 juin 2000 de détenus, famille et surveillants de Moulins-Yzeure :

Un détenu de la centrale de Moulins-Yzeure (Allier) « L’appel a lieu à 7 heures du matin, et à 7 h 15 il y a le départ de ceux qui travaillent aux ateliers et qui en reviennent à 13 h 30. Les autres restent en cellule. Logiquement, à 14 h 05, c’est la promenade, mais depuis que les portes sont fermées, nous sortons tous les jours avec quinze minutes de retard. Pour accéder à la cour, nous traversons toute la détention et nous sommes désormais fouillés à l’aller. Imaginez le bouchon quand 8 à 10 personnes attendent la fouille ! Tout cela c’est du temps en moins pour la promenade ! Au retour, nous sommes fouillés aussi et nous réintégrons nos cellules dont les portes sont fermées depuis deux mois. « Pour chaque mouvement, il faut sonner un surveillant qui se charge d’envoyer le surveillant d’étage, que ce soit pour vider la poubelle, pour aller à la douche ou à l’infirmerie. A la douche, maintenant, nous sommes enfermés à clé et il faut à nouveau sonner pour sortir. Plus infantilisant, je ne crois pas que cela existe ! Et les surveillants ont cent fois plus de trajets à faire, de tours de clé à donner. « Depuis que des détenus ont essayé de s’évader, il y a ici une pression constante. Je ne parle même pas des intervenants extérieurs, les professeurs et autres, qui, eux, ont jeté l’éponge depuis un bon moment, en ne venant plus dans cette espèce de mouroir ! »

Une femme de détenu de la centrale de Moulins-Yzeure « Depuis la tentative d’évasion, il y a une tension terrible, côté surveillants et côté détenus. Ils ont fermé les portes des cellules, et le directeur nous a dit qu’il suivait les directives ministérielles. Des surveillants nous ont raconté qu’ils avaient été sanctionnés pour ne pas avoir fermé ces portes, et même menacés de mutation. Comme les transferts ont été stoppés, du même coup les détenus qui suivent une scolarité et doivent passer des examens en ont été empêchés : ils sont transférés dans d’autres prisons le temps de l’examen. Alors ils ont perdu leur année scolaire. Dans la vie de tous les jours, les détenus sont obligés d’appeler pour le moindre geste. L’autre jour, l’un d’eux a été oublié trois heures dans la douche. Il y a quinze jours, nous attendions pour entrer au parloir et, à l’extérieur, il y avait ces nouvelles brigades d’intervention, une centaine d’hommes bottés, casqués, cagoulés qui sont entrés au pas de course dans l’établissement. Ça fait un effet terrible. « Et puis, on ne peut s’empêcher de penser que s’ils sont cagoulés c’est qu’il va se passer des choses anormales... L’ambiance est très dure, il va se passer quelque chose de grave ! ». 3 mai 2003

Témoignages de surveillants de maisons centrales, qui dénoncent les conditions de détention.

"Une longue peine, c’est une peine de mort". A la prison centrale de Moulins-Yzeure (Allier), "la plus sécuritaire d’Europe", personne ne peut bouger un doigt sans être filmé par l’une des caméras qui tournent en permanence. Les plafonds sont très bas, les sas de sécurité nombreux, les grilles s’ouvrent et se ferment en continu. Toutes ces précautions n’ont toutefois pas empêché, il y a peu, une spectaculaire évasion en hélicoptère. Ici vivent les "longues peines", les condamnés à plus de cinq ans de prison.

"Tous ces sas à traverser pour se rendre d’un lieu à un autre, tous ces contrôles électroniques, ces plafonds qui touchent presque la tête, tout cela rend l’atmosphère extrêmement pesante", raconte Jean-François Chaume, surveillant à Moulins, vingt-trois ans d’administration pénitentiaire et délégué Ufap (Union fédérale autonome pénitentiaire). Comme tous les professionnels du monde carcéral, il voit les peines s’allonger et les incarcérations tomber "à tour de bras". Les condamnés à de très longues peines, à plus de vingt ans, "vivent ici sans perspective d’aucune réinsertion ou de s’en sortir un jour". Pour ceux-là, les libérations conditionnelles tombent au compte-gouttes : "On enlève aux gens l’espoir qui leur permet de tenir, de se scolariser, de passer des diplômes. Quelqu’un qui a des perspectives entrevoit le bout du tunnel, tandis que celui qui n’en a pas ne peut approuver son enfermement. Et même si la routine s’installe, la tension est là", dit encore le surveillant.

Manque de moyens. A Moulins, les détenus peuvent suivre des formations. Ils sont 40 sur les 130 que compte la centrale à être répartis entre la vidéo, la marqueterie et l’informatique. Ouverte en 1983, la centrale a été entièrement restructurée après une grosse mutinerie en 1992 et rouverte en 1995. Jean-François Chaume pense qu’"on ne devrait pas garder les gens ici plus de cinq ans, ça fait sauter les plombs. Etre enfermé à Moulins influe sur le comportement. On voit les caractères devenir très agressifs, il y a beaucoup de violences entre détenus, sûrement plus qu’ailleurs". Les peines de sûreté ont été votées par le législateur, mais sans moyens supplémentaires, sans jamais en évaluer les effets. Le syndicaliste se met en colère. Il pense aux mesures prises pour humaniser la prison, aux unités de vie familiale, autrement appelées "parloirs sexuels", au bracelet électronique : "Je signe des deux mains pour que les prisons soient les plus humaines possibles, mais qu’on ne se moque pas de nous ! Nous n’avons pas de moyens, juste des discours."

A la centrale de Poissy, Philippe Sanchez est lui aussi surveillant et délégué CGT. Il vit dans une autre ambiance. Moins lourde qu’à Moulins. "Nous n’avons pas de grilles tous les cinquante mètres, les surveillants sont plus au contact des détenus et peuvent réduire les tensions, désamorcer les conflits." Et pourtant les longues peines y sont tout aussi difficiles à vivre. Ni conditionnelles, ni commutation de perpétuité : "On gère la crise. Quand un détenu explose, on le transfère et les gars tournent comme ça entre les prisons. Imaginez pour la famille qui doit se balader sur des centaines de kilomètres." Comme son collègue de Moulins, il dit que les détenus doivent bien sortir un jour, mais que la plupart sortent sans préparation, et "ils sont alors plus fauves que lorsqu’ils sont arrivés". Il se dit certain "qu’au bout de 12 ou 15 ans, la peine n’a plus vraiment de sens, sauf pour quelques cas particuliers. Après toutes ces années, ce n’est plus le même homme que celui qui a commis le crime ou le délit".

Devenus fous. Les perspectives de sortie, la libération conditionnelle, les placements extérieurs, la semi-liberté, Philippe Sanchez décline toute la panoplie qui permet d’aménager les longues peines, de laisser entrevoir des perspectives d’une autre vie, mais qui est trop peu utilisée. "Tout le monde ne doit pas effectuer sa détention de la même manière. Il faut des phases avec un projet d’exécution des peines, des aménagements, de l’aide, de la souplesse, en tenant compte de la volonté de réinsertion, estime le surveillant. Nous voyons des gens retourner dans la société sans aucune préparation et revenir quelque temps plus tard." Il connaît des détenus enfermés depuis presque vingt-cinq ans : "Ils sont devenus fous, n’ont plus la notion du temps. Ils se cantonnent dans leur petit monde, n’ont aucun rapport avec les autres ou alors ça tourne mal."

A Poissy, l’un d’eux tente d’allumer un feu dans la cour pendant que les autres jouent au foot, c’est son obsession. "Il a des crises et, pour lui comme pour d’autres, on emploie la camisole chimique. Sans jamais régler le problème de fond." Il a vu des détenus mourir : "On appelle ça décéder de causes naturelles. En fait, ils sont morts à petit feu. Les longues peines, c’est une peine de mort.".

http://www.liberation.fr/page.php ?Article=340561


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