Le JPB > Pays Basque
2006-01-07
·Xabier P. Susperregi, arrêté sous un mandat de 1992, a été remis en liberté, l’Espagne ayant avisé que l’affaire était prescrite
"Comment ça va ?" lui a lancé un ami peu avant le début de la conférence de presse. "ça va mieux qu’hier ?" a répondu Xabier Perez Susperregi, le visage détendu. Une fois assis devant les journalistes, le regard du porte-parole du Collectif des exilés politiques basques est plus sévère. En application d’un mandat d’arrêt international émis en 1992, il a été arrêté tôt la veille alors qu’il accompagnait son enfant à l’ikastola. Puis, il a été transféré à Pau pour y être présenté au parquet général. C’est au moment où il devait être écroué qu’un fax adressé par les autorités espagnoles a informé de la prescription des présumés faits reprochés.
"L’attitude de l’Etat français est inqualifiable. On m’a interpellé sur des faits présumés datant des années 80, des faits pour lesquels j’ai déjà été entendu en présence de la juge Levert en 1992 dans le cadre d’une commission rogatoire. À l’époque j’étais incarcéré à La Santé. Pourquoi donc ce mandat d’arrêt international n’avait pas été appliqué ? Et surtout, pourquoi maintenant ?", s’est-il interrogé.
La naïveté de la réponse qui lui a été donnée ne fait que l’exaspérer. "On m’a dit que l’affaire était dans les archives, que quelqu’un était tombé sur le dossiers" a-t-il dit avant de demander : "Pour quelle raison un mandat d’arrêt émis en 1992 est appliqué maintenant par Paris ? D’où est-il parti l’ordre de m’interpeller ?"
Intention politique
Xabier Perez Susperregi a rappelé qu’il habitait "au Labourd depuis des années, de façon publique. Je ne me suis jamais caché". Ce qui le pousse à penser qu’il y a des raisons politiques derrière l’interpellation. "Non pas parce qu’il s’agit de moi, mais parce que Paris a souhaité cibler le Collectif des exilés politiques basques".
Cet Oreretar âgé de 45 ans souligne le fait que la police l’a interpellé alors qu’il accompagnait son enfant à l’ikastola de Bayonne. "En passant, on a voulu faire l’amalgame, on a souhaité criminaliser non seulement les exilés, mais le monde de la langue basque et des ikastolas D’ailleurs, certains quotidiens espagnols n’ont pas tardé à titrer qu’un membre de ETA, en effet on m’a traité de membre de ETA, avait été arrêté alors qu’il emmenait son fils à l’ikastola".
Pour Xabier Perez Susperregi, l’intention politique des autorités françaises est "évidente", tout comme pour Oskar Bizkai, porte-parole d’Askatasuna. "Cet épisode montre bien que Paris ne joue plus le rôle de simple collaborateur mais d’agent actif et autonome du conflit politique basque. L’Etat français semble vouloir être protagoniste tout en refusant de faire partie du problème".
Askatasuna a rappelé que mardi prochain, 10 janvier, la Cour de Pau décidera du sort des jeunes Jon Garmendia et Ekain Rodriguez sur lesquels pèsent deux mandats d’arrêt européens. "Alors que l’idée d’un processus de résolution démocratique du conflit basque semble enfin avancer en Pays Basque et ailleurs, on peut se demander quelle attitude prendra désormais l’Etat français sur la question".
"Un obstacle à la résolution du conflit"
L’application de ce mandat d’arrêt international relève d’une convention adoptée en 2004 qui est entrée vigueur en 2005, selon Askatasuna."Par la nouvelle procédure, les délais deviennent très courts, et on peut extrader n’importe qui en à peine une semaine. Par ailleurs, selon cette nouvelle procédure, la question de la prescription des délits est basée non pas sur le code pénal des Etats où la personne visée par le mandat est retenue, mais par le code de l’Etat ayant émis la demande d’extradition".
Selon le Collectif des exilés, c’est la première fois que cette nouvelle procédure est appliquée à un citoyen basque en liberté, mais les autorités françaises "ont déjà essayé de l’appliquer à un prisonnier basque".
En représentation du mouvement pro-amnistie, Lorea Zeziaga a souligné le fait que Xabier Perez Susperregi est "l’un des porte-parole du Collectif des exilés" et que dans ce sens Paris semble avoir voulu mettre "un obstacle à la résolution démocratique du conflit". Lorea Zeziaga a rappelé que les exilés confirment leur engagement avec la proposition de résolution du conflit présentée le 14 novembre à Anoeta et a souligné qu’ils continueront à défendre sur le territoire de l’Etat français leur droit au travail, leur droit à la sécurité sociale, leur droit à vivre en Pays Basque et leur droit à participer au processus de résolution du conflit.