lundi 21 novembre 2005, 12h07

MADRID (AFP) - Le plus important procès jamais organisé contre les organisations satellites de l’ETA s’est ouvert lundi à Madrid, sur fond de spéculations autour d’une trêve de l’organisation séparatiste basque armée. Cinquante-six accusés encourant des peines de 10 à 51 années de prison vont comparaître pendant quatre à six mois pour appartenance ou collaboration avec l’ETA et des délits fiscaux, devant les juges de l’Audience nationale, dans un pavillon aménagé du parc madrilène de la Casa de Campo. L’organisation clandestine a fait sauter trois engins explosifs dans la nuit de samedi à dimanche à Vitoria, la capitale du Pays Basque espagnol, contre un concessionnaire automobile Renault et une entreprise de bicyclettes. Les accusés appartiennent à un conglomérat d’organisations basques agissant sur le terrain politique (Kas-Ekin), international (Xabi), médiatique et culturel (le journal Egin) ou promouvant des actions de désobéissance civile (Fondation Joxemi Zumalabe).

Selon la thèse du juge Baltasar Garzon qui a instruit le dossier entre 1998 et 2002, l’ETA n’aurait pu survivre et agir sans ces organisations qui forment son réseau d’appui social. Les accusés souhaitent faire du procès une caisse de résonance pour leurs thèses sur un règlement du conflit au Pays basque. Arrivés sur le lieu du procès à bord de trois autocars, ils ont tenté de se faire enregistrer avec "une carte d’identité basque", un document fabriqué par les nationalistes.

Ce procès intervient dans un contexte très différent de celui qui avait marqué le début de l’enquête du juge Garzon : la droite était au pouvoir et l’opposition socialiste avait scellé avec elle un pacte antiterroriste privilégiant la voie répressive pour en finir avec l’ETA. Désormais, les rumeurs vont bon train sur l’annonce d’une trêve de l’ETA, préalable à une éventuelle négociation avec le gouvernement socialiste de José Luis Rodriguez Zapatero. Le bras politique Batasuna a émis il y a un an une proposition de "règlement politique" du "conflit basque", avalisée par l’ETA.

M. Zapatero a ensuite tendu la main à l’ETA en lui promettant un "dialogue politique" si elle renonçait au préalable définitivement à la violence. Les journaux espagnols d’opposition espéraient lundi que cette nouvelle donne serait sans incidence sur le "procès des tentacules de l’ETA". "Le procès intervient à un moment politique qui convient peu à la stratégie prônant une fin négociée du groupe terroriste", commentait La Razon (droite), en dénonçant "un contexte compliqué de pression politique sur les juges".

Le nationaliste modéré Josu Imaz, président du Parti nationaliste basque (PNV, démocrate chrétien) a averti ce week-end que "la gauche indépendantiste basque n’accepterait jamais une défaite par K.O.". Il a ajouté lundi dans une interview qu’il existait "des facteurs pour croire à la fin de l’ETA à moyen terme" mais qu’il fallait faire preuve d’une "tolérance zéro" tant qu’elle poursuivrait ses attentats.