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Un interview pour comprendre la nature d’un engagement. (Association « Aime le mot dit »)

L’entretien est un dialogue avec un ancien cadre du PKK (Parti des Travailleurs du Kurdistan, mouvement activiste kurde, révolutionnaire et armé), pour tenter de comprendre la nature d’un engagement. L’interview nous a été accordée dans le cadre d’une délégation du collectif associatif méditerranéen pour le respect des droits de l’homme en Turquie, composé de Stéphanie Dupont (universitaire), David Gros (Association SPID), Jean-Marie Plume (Ligue des droits de l’homme), Sophie Roudil (Solidarité et liberté) et Louis Zollet (Aime le mot dit), et d’une mission d’observation du Conseil Général des Bouches du Rhône, conduite par Joël Dutto (Vice Président) et Chantal Jaffrain (direction des relations internationales), au mois de mars 2003 en Turquie.

Interview : Association « Aime le mot dit » Enregistrement, réalisation et transcription : association SPID. Diffusion de ce fichier libre de droits sur les radios associatives

Tout d’abord, je voudrais commencer en vous remerciant tous d’être là aujourd’hui chez moi et d’être également dans notre pays. Je remercie d’ailleurs tous les groupes qui se déplacent jusqu’ici pour voir ce qui se passe et ce que nous vivons. Je suis né en 1951 à Diyarbakir, dans l’est de la Turquie. Cela fait déjà huit ans que je vis à Istanbul. Je me suis installé à Istanbul contre mon gré. Je n’ai pas choisi de m’installer ici. J’ai été forcé. C’était pour moi une question de vie ou de mort. C’est après m’être installé à Istanbul, que j’ai commencé à travailler dans le cadre légal des mouvements politiques.

Question : Quel a été votre premier contact avec la politique puis votre premier acte de conscience politique ?

« En 1976, j’ai fait connaissance avec le mouvement nationaliste kurde. A l’époque, le PKK n’existait pas encore. Il y avait le DDKD. Ce sont des personnes issues du DDKD qui ont créé par la suite le PKK. J’ai commencé à prendre place au sein de cette lutte-là parce que j’ai pris conscience de la souffrance de mon peuple. J’ai réalisé que c’était le peuple le plus opprimé de Mésopotamie et qui fallait absolument lutter pour ça ne continue pas. »

Question : Les Kurdes constituent le peuple le plus nombreux au monde ne possédant pas d’état. Qu’est-ce qui vous fait passer de cet état de révolte à la décision de rentrer dans l’action, et quelle option d’action choisissez-vous à ce moment-là ?

« Pendant quinze à vingt ans, le peuple kurde a mené une lutte armée au sein du PKK. Il a fallu commencer par une lutte armée, parce que c’était le seul moyen d’ouvrir le chemin à une politisation et à une lutte politique plus tard. C’est ce à qui nous nous employons en ce moment. A l’époque, nous n’avions pas le choix. La lutte armée était le seul moyen pour dire au monde que nous existions. Que ce soit clair, nous n’avons jamais été pour la guerre. Mais aujourd’hui, nous avons assez appris et nous sommes assez mûrs pour nous lancer dans une lutte politique. Je suis conscient du fait que la guerre n’est pas un moyen de résoudre le problème kurde. Parce qu’avant cette guerre, c’était déjà la guerre qui faisait que nous n’arrivions pas à trouver une solution. Mais pendant vingt ans, nous avons mené une guerre différente. C’était une guerre qui nous a permis d’ouvrir le chemin vers une politisation. Parce que nous nous rendions compte que la guerre n’était pas une solution, le PKK a proposé une trêve. Elle a fait une paix, même si elle est unilatérale et que la Turquie ne suit pas. Pour être clair, nous savons très bien que ce qui intéresse la Turquie est leur politique d’extermination du peuple kurde. »

« Nous savons très bien que la négociation n’est pas possible pour l’instant. Le peuple kurde demande seulement la paix, la liberté et la fraternité. Nous avons cher payé le prix de cette guerre avec des milliers de morts. Au nom de tous ces morts, nous n’arrêterons pas cette lutte. Aujourd’hui, il faut tout simplement s’asseoir à une table et discuter. Cela n’est malheureusement pas possible pour l’instant. Une chose est claire, c’est que dans l’avenir, il n’y aura pas d’autre alternative que celle-ci. Regardez ce qui se passe dans le monde, ce qui s’est passé au Viêt-nam, ce qui s’est passé en Afrique. Les gens étaient des esclaves. Mais combien de temps sont-ils restés esclaves ? Maintenant on rit au visage des gens qui ont été réduits en esclavage. Je suis sûr que l’on peut résoudre ce problème par les négociations. De toute façon, après toute la souffrance endurée par les Kurdes, nous finirons par obtenir les droits que nous demandons. » Intervention de l’épouse (en langue kurde) : « Il ne faut pas oublier dans tout ça que lorsque nous avons fui et sommes arrivés ici, pendant six à sept ans, nos enfants ont souffert de cette fuite. »

Intervention de la traductrice : « Je connais leur histoire. Comme Monsieur a fait de la prison et qu’ils étaient sans père pendant quatre ans. Comme il n’y avait pas de ressources, c’était très difficile. »

Reprise de l’épouse : « C’étaient les premières années. Nous sous sommes enfuis, donc les enfants se son enfuis en même temps avec nous. Ils ont vécu cette psychologie de la fuite comme nous. »

Question : Est-ce que vous pouvez nous expliquer les conditions de cette fuite et surtout les raisons ?

Réponse du chef de famille : « Les ennuis ont vraiment commencés en 1992, lors d’une garde à vue où on m’a accusé d’être au PKK. J’ai été placé en garde à vue et directement jugé. Je ne sais pas comment ils m’ont jugé, mais je sais que je me suis retrouvé en prison pendant un an. Après mon année de prison, je suis sorti en 1993, mais j’étais continuellement poursuivi par la police. On m’a proposé de devenir un agent et de dénoncer tous les membres que je connaissais. J’ai systématiquement refusé. Mais à chaque fois que je refusais, ils revenaient. Ils ne m’ont pas laissé tranquille. Ils m’ont menacé de mort si je n’acceptais pas. À l’époque, il n’y avait pas d’organisme comme IHD (la Ligue des droits de l’homme) où l’on pouvait aller demander de l’aide, dire qu’on avait telle et telle menace, qu’il fallait faire attention, que si on disparaissait, il y avait une raison. Je voudrais préciser que si je n’étais pas venu à Istanbul, aujourd’hui, je serais mort et vous n’auriez pas pu faire cette interview avec moi. Parce qu’ils proposent tout aux personnes avec qui ils ne s’en sortent pas. Ils leur font faire des gardes à vue, de la prison, leur font subir des tortures, ils leur proposent de devenir un agent. Si ça ne marche pas, la seule chose qui leur reste est de les exterminer. Il y a plein de gens qui sont mort comme ça. On ne sait ni comment, ni où ils sont. Plusieurs fois, ils sont venus chez moi quand j’étais à Diyarbakir. À trois reprises, ils sont venus chez moi pour m’emmener et pour me tuer. Mais à trois reprises, je n’ai pas ouvert la porte. À trois reprises, j’ai appelé tous les amis que je connaissais pour les prévenir qu’il y avait les flics devant ma porte. J’ai appelé le commissariat pour leur demander s’ils avaient vraiment envoyé des gens pour me prendre en garde-à-vue. Parce qu’il arrive que ce soient des flics eux-mêmes, qui prennent l’initiative d’éliminer telle ou telle personne, sans que quiconque soit au courant. Finalement, le troisième soir où ils sont venus chez moi, lorsqu’ils sont repartis, je savais que ça devenait trop dangereux et que la prochaine fois, je pouvais me prendre une balle dans la rue. Ce soir-là, j’ai directement quitté le district de Bismil pour me diriger vers la ville de Diyarbakir. J’ai vu, avec mes amis, un des cadres du PKK. Je leur ai expliqué la situation, et demandé de me sortir de là, parce que sinon, j’allais être tué. Ils connaissaient la situation dans laquelle je me trouvais et ils ont pris l’initiative de m’emmener en dehors de la ville pour me faire prendre un bus qui se dirige vers Istanbul. Pour ne pas être repéré, j’ai dû marcher 60 kmà pied entre Bismil et Diyarbakir, car ils arrêtaient toutes les voitures. J’ai passé quatre à cinq mois à Istanbul dans des familles kurdes. Et finalement, je me suis rendu compte que je n’allais jamais retourner, que si je retournais, c’était la mort assurée. J’ai donc appelé mes enfants et ils ont tous pris le bus pour arriver ici. »

« Juste pour vous donner un exemple. Une dizaine des mes amis ont subi le sort que j’aurais pu subir si je n’avais pas quitté Diyarbakir. Un de mes plus proches amis (intervention de la traductrice : c’est quelqu’un des très connu chez les Kurdes) a été assassiné par la police. Deux jours plus tard, on a retrouvé son cadavre sur les bords de l’Euphrate. C’était à la fois un grand intellectuel et un grand lutteur. Plus d’une dizaine de mes amis très proches, avec lesquels je vivais quotidiennement, ont été assassinés par la police, parce qu’ils avaient ouvert quand ils avaient tapé chez eux en disant " police ouvrez ". Parce qu’ils on ouvert la porte, plus d’une dizaine de mes amis sont morts. »

Question : « Contre qui s’applique la répression qui s’exerce dans le village ? Cela concerne-t-il seulement les résistants, les personnes qui ont une activité politique, ou la répression s’applique-t-elle à l’ensemble de la population ? »

« Le fait d’être un kurde suffit pour subir la répression. Un kurde est considéré d’emblée comme un suspect, comme un potentiel " terroriste ". La Turquie n’accepte pas les Kurdes. Donc le fait de vouloir revendiquer un Kurdistan, le simple fait de vouloir revendiquer ou de se dire kurde, est considéré comme une erreur de notre part. Le fait d’être ou de ne pas être dans la lutte ne change rien. Le fait d’être kurde suffit. Le problème est double : d’une part, nous sommes réprimés parce que nous luttons, mais si nous ne luttons pas, nous sommes réprimés parce que nous sommes kurdes. Cela fait soixante-seize ans que la république turque existe. Ce sont les kurdes qui ont créé la république turque. Car c’est en se donnant la main avec les Turcs, qu’ensemble ils ont créé le Parlement, qu’Atatürk a appelé le parlement des turcs et des kurdes. Plus tard, les Kurdes ont été virés quand on avait plus besoin d’eux. Leur langue était interdite, tout comme leur culture. Ils n’avaient plus le droit d’exister. Si vous allez au Kurdistan, regardez sur toutes les montagnes, sur toutes les collines. Il est marqué : " je suis fier d’être turc ", ou il y a un drapeau turc de dessiné. Comment prenez-vous ça ? Pour les Kurdes qui vivent là-bas, on n’est pas des Turcs, on est des Kurdes. C’est une insulte directe aux populations d’écrire ça sur ces montagnes. Les Kurdes sont le plus vieux peuple de la région, mais ils ont toujours été rejetés. Quand ils vont en Europe, les représentants du gouvernement turc disent qu’ils sont comme ongle et peau avec les Kurdes. C’est à dire qu’ils ne font qu’un. Mais quand l’ongle pousse trop loin, il commence à arracher la peau. C’est ce que les Turcs font avec les Kurdes : ils arrachent la peau des Kurdes. Il ne faut pas croire ce qu’ils vous disent. Ce n’est pas la vérité. Il faut vous rappeler qu’il y a eu huit soulèvements importants dans l’histoire des Kurdes. Le dernier s’est soldé par quinze ans de guerre. Aucun dieu au monde ne pourra arrêter le neuvième soulèvement. C’est la dernière occasion de trouver une solution, parce que la prochaine fois, personne ne pourra rien nous reprocher. Ne le prenez pas mal, parce que je sais que vous êtes des gens bien et qu’il y a des gens très bien en Europe qui essaient de comprendre ce qui se passe chez nous et qui essayent de nous aider. Mais nous savons que les gouvernements européens jouent un double jeu. S’ils ne faisaient pas la politique de l’autruche, nous aurions obtenu beaucoup plus de droits. Nous aurions réussi à avoir un minimum de terres et à pouvoir vivre en paix. Les Kurdes constituent un peuple qui a un Kurdistan en Syrie, un Kurdistan en Irak, un Kurdistan en Iran et un Kurdistan en Turquie, mais ils n’ont pas de Kurdistan à eux. Dans un monde pareil (pourtant le monde est grand), n’y a-t-il pas un petit coin de terre que l’on peut occuper et sur lequel on puisse vivre tranquillement ? »

Question : « En 1992, vous faites un an de prison. Mais ce n’est pas la seule répression que vous allez endurer de la part du pouvoir turc. Pouvez-vous nous raconter ce qui vous est arrivé par la suite, et la nature de la répression que vous avez dû subir ? »

« En 1992, j’ai été placé en garde-à-vue avec cinq de mes neveux (cinq fils de mon frère). Nous avons passé vingt-neuf jours en garde-à-vue, sous torture. Voici la liste des tortures que j’ai subies : courant électrique sur les parties génitales, eau froide sur l’anus, la bouche et le nez, pour m’empêcher de respirer. Pendaison à la palestinienne, à l’envers et à l’endroit. Pas le droit de manger pendant des jours. Vingt-quatre heures enfermé dans le noir avec un bandeau sur la tête et les mains attachées. Écouter des cris enregistrés sur cassette, de gens qui sont torturés. Nous empêcher d’aller aux toilettes, ... Ce sont les pires tortures que j’ai eues dans ma vie, et pourtant, j’en ai subies pas mal. Je ne compte plus les gardes à vue que j’ai endurées. Suite à ces tortures pendant vingt-neuf jours, j’ai perdu toutes mes dents. Le courant électrique était tellement fort que les gencives ne tenaient plus les dents. J’ai des problèmes musculaires. J’ai des courbatures partout depuis. J’ai une hernie au dos. Je ne compte pas toutes les maladies dont je souffre. A part les gardes à vue, je suis allé six fois en prison en Turquie. Mais jamais je n’ai eu droit à un traitement aussi barbare que celui là. De toute façon, la torture n’est pas le plus important. Ce qui nous fait le plus de mal pendant ces tortures, c’est qu’on est toujours pris avec des amis ou des proches, et qu’on nous fait écouter les cris des proches pendant qu’on les torture ; On supporte nous-même la torture, mais ce qui nous fait le plus de mal, c’est de les entendre crier à l’autre bout du couloir. »

« Par la suite, j’ai été mis en garde-à-vue, jugé et envoyé 17 mois dans la prison d’Istanbul. A cette époque, j’étais président du HADEP d’un des district d’Istanbul et j’ai été bien sûr accusé d’être au PKK. Si j’ai fait 17 mois, c’est que la peine a été réduite par le jeu des grâces. Sinon la peine était de trois ans de prison ferme. Plusieurs fois, j’ai été envoyé deux ou trois mois en prison, et je ressortais. Ce qui m’énervait le plus, c’est que cet État, dont j’avais l’étoile et le croissant dans ma poche, sur ma pièce d’identité, se disait être notre père à tous. Moi je me considérais comme un orphelin, car j’étais toujours considéré comme une deuxième catégorie de citoyens. Je peux dire aujourd’hui que j’ai honte d’avoir des papiers turcs. D’après ce que j’en sais, 60% des Kurdes sont dans ma situation. Ils ont honte de se dire citoyens turcs. Il est clair qu’aucun peuple au monde n’a de plaisir de vivre sous le drapeau d’un autre peuple par obligation. Nous l’avons subi. Nous n’avons rien dit pendant des années. Aujourd’hui, nous avons arrêté de revendiquer un territoire. Tout ce qu’on demande, c’est la dignité et avoir des droits. Je veux tout simplement que mes enfants puissent aller à l’école apprendre leur langue maternelle. Ne pas oublier leur culture et pouvoir la faire vivre. Car sinon, nous allons disparaître. Ce sont les seules revendications que nous avons. »

« Nous avons par exemple une télévision qui s’appelle MEDIA TV. Cette télévision est harcelée en permanence. On essaye de brouiller ses émissions en créant des interférences par satellite. En Turquie, si un intellectuel turc demande des droits pour un peuple (il ne l’a pas dit ouvertement mais il parle des peuples d’origine turque), le gouvernement apporte toute l’aide qu’il demande. Mais quand les Kurdes demandent la plus petite chose, quand c’est un intellectuel kurde qui ouvre la bouche pour dire la plus petite chose qui dérange le gouvernement, il est tout de suite viré. On lui fait subir un sort qu’il ne mérite pas. »

« En ce moment, j’ai quatre procès en cours. Je vais vous en citer trois. Le premier se rapporte à la journée mondiale de la paix de 2002. Au mois de septembre, nous avions rédigé des affiches que nous avions collées partout, en souhaitant une bonne journée de la paix à tout le monde. Mais nous avions rédigé cette affiche en turc et en kurde. Ce pays, qui a soi-disant autorisé - dans sa constitution - le droit de parler le kurde, me fait un procès pour séparatisme, parce que j’étais un des dirigeants qui a fait imprimer ces affiches sur lesquelles il était marqué " viji açiti ", ce qui veut dire " vive la paix ", en kurde. J’ai donc un procès pour ces affiches. Le deuxième se rapporte à un tract que nous avions publié pour le nouvel an kurde, le 21 mars dernier, en souhaitant un bon Newroz à tout le monde. Nous avons écrit " Newroz " avec un " W " (NDLR : le W ou le O existent dans l’alphabet kurde mais pas dans l’alphabet turc. Les Kurdes ont obligation d’écrire Nevruz et pas Newroz). Le troisième procès concerne des affiches que nous avions collées pendant les élections, car elles comportaient des écritures en kurde. On avait aussi mis un " W " pour écrire " Newroz ". Le quatrième procès se rapporte à la fermeture du parti HADEP. J’ai un procès pour m’interdire de faire de la politique.

La Turquie dit être un pays qui respecte les critères de Copenhague et qu’en conséquence, aucune raison de l’empêche de rentrer dans l’Europe. Mais la Turquie ne respecte même pas la première lettre du mot Copenhague. Tout d’abord parce que, si on parle du droit des minorités - même si nous ne sommes pas une minorité - quels droits la Turquie nous donne-t-elle ? Elle ne nous respecte pas, mais alors pas du tout. La Turquie se dit être un pays démocratique, mais en fait, la Turquie est l’exemple typique d’un pays fasciste. »

Question : « Aujourd’hui, vous conservez des responsabilités politiques, mais vous devez aussi vivre au quotidien, comment vous organisez-vous gérer à la fois votre vie publique et votre vie privée ? »

« Pendant un an ou deux, j’étais un cadre du parti et je n’ai fait que de la politique. Je me suis rendu compte que cela n’était plus possible de continuer comme ça, car j’ai aussi des responsabilités familiales. Il fallait que je subvienne aux besoins de ma famille car personne d’autre n’allait le faire pour moi. Cela fait trois ans que je fais de la politique et qu’en même temps je travaille. Bien sûr, c’est très difficile de gérer deux activités qui me prennent autant de temps l’une que l’autre. Mais justement, ce qui est important pour moi, c’est de réussir ce qui est difficile. »

« Ma famille, c’est une chose. J’ai des responsabilités en vers eux. Mais je considère que ma famille est une petite partie de la grande famille à laquelle j’appartiens. Ma grande famille, c’est le peuple kurde. Considérez que pour moi, l’une est aussi importante que l’autre. Parce que vous ne pouvez pas marcher sur un pied. Il faut les deux pieds pour marcher. Pour nous, c’est pareil : c’est un pied chacun. J’essaye de faire de mon mieux et je sais que je ne suis pas assez bon. Je ne suis pas content de moi parce que je n’arrive pas à faire ce que je veux faire. Je ne suis pas assez bon à la maison et je ne suis pas assez bon en politique. Ce sont malheureusement les empêchements. Je ne peux pas y faire grand chose. » Question : « Très peu d’hommes auraient réussi à surmonter les épreuves que vous avez surmontées. Quelle force vous anime et vous permet de poursuivre la lutte ? Parce qu’aujourd’hui, vous poursuivez votre combat politique. Qu’est-ce qu’ils ne sont pas arrivés à vous prendre et que vous avez toujours aujourd’hui ? »

« J’apprécie cette question car je trouve que c’est pour l’instant la meilleure question que vous m’avez posée. C’est une question très importante car elle veut tout dire. Ce qui me permet et ce qui nous permet de continuer, ce sont nos valeurs. Pour moi, ce que j’appelle mes valeurs, c’est tour d’abord ma fille. Ma fille qui est morte au combat. Ce sont les quarante mille jeunes qui sont morts au combat. Ce sont eux qui me permettent de tenir et de continuer. Si je peux aujourd’hui, dire ouvertement, face à vous, que je suis kurde, c’est grâce à ces personnes-là. C’est grâce à tous ces jeunes qui sont morts. J’ai actuellement huit enfants. Je peux dire que si les huit devaient mourir, je n’arrêterais pas. Je continuerais. Rien ne peut m’arrêter. Je suis prêt à envoyer mes huit enfant au combat s’il le faut, même si ce n’est pas cela que je veux. Je ne reculerai jamais. Ce n’est pas que je n’arrêterai pas, c’est que je ne ferai même pas un pas en arrière. J’ai donné un enfant. J’ai donné beaucoup de neveux et de nièces. Dans ma famille, neuf martyrs portent mon nom. Ce n’est pas rien. C’est ce qui me donne le courage, c’est ce qui me rattache à la lutte. Ces martyrs sont la plus grande valeur du peuple kurde, où que le peuple soit dans le monde. Le fait que je supporte la vie ici, à Istanbul, où je ne suis pas sur mes propres terres : ce sont eux qui me donnent le courage. Le fait que les kurdes soient en Europe, et qu’ils supportent la vie qu’ils ont là-bas, car ils sont loin de leurs terres (et ils tiennent beaucoup à ces terres), ce sont les martyrs qui leurs donnent ce courage. En fait, les martyrs sont comme le pain et l’eau. Ils sont plus importants que le pain et l’eau. Ce sont des gens qui ont nourri cette lutte. Ils sont morts pour nourrir cette lutte. Cette lutte ne s’arrêtera jamais, parce que le peuple kurde n’est pas prêt d’arrêter de donner des martyrs. »

« La Turquie est un pays qui ressemble au loup. Les loups aiment bien chasser en temps de brouillard. La proie ne les voit pas, mais eux, ils ont des bons yeux. Pendant cette période de confusion dans le monde entier, pendant que les Etats-Unis essaient de faire la guerre à l’Irak, la Turquie en a profité pour empêcher que le leader kurde Abdullah Ochalan ait accès à ses avocats. Personne, dans le monde entier, ne se rend compte qu’il se passe quelque chose comme ça en Turquie, parce que les gens sont occupés à voir autre chose. La Turquie en a profité pour interdire le HADEP. Elle en a profité pour interdire quarante-cinq membres du HADEP de faire de la politique pendant cinq ans. C’est une politique classique de la Turquie. A chaque fois qu’il y a une confusion dans le monde, elle en profite pour faire un peu de nettoyage sur son propre territoire. Abdullah Ochalan est considéré par la Turquie comme un terroriste. Mais nous, les Kurdes, considérons que c’est le seul homme qui a réussi à nous redonner l’honneur que nous avions perdu. C’est un homme qui nous a rendu notre honneur et qui nous a réveillé du sommeil profond dans lequel nous étions et qui a fait qu’on ne se rendait pas compte de ce qu’on était et des droits auxquels nous avions simplement droit. Si ce ne sont pas les quarante millions, je suis sûr que près des quarante millions de Kurdes, même s’ils ne sont pas pour Ochalan, le remercient quand même d’avoir réussi à réveiller les mentalités, à réveiller le peuple kurde. On présente Ochalan, partout dans le monde, comme un meurtrier de bébés (avec des photos de bébés assassinés dans les journaux). Ce n’est pas Ochalan qui a assassiné ces bébés. On sait très bien que c’est le gouvernement turc qui les a tués. Comment est-ce que dans la mentalité des gens qui sont en dehors de la Turquie (les Européens notamment), pouvez-vous croire qu’Ochalan est un tueur de bébés ? Ochalan est justement quelqu’un qui essaie d’éviter qu’encore plus bébés soient tués. Dans quelle logique est-ce que quelqu’un peut tuer son peuple et peut essayer de le faire avancer en même temps ? Est-ce que vous ne vous posez pas la question ? »

« La politique de la Turquie est d’aller en Europe dire que tout se passe très bien et de revenir ici continuer le massacre. L’état turc a rasé la totalité des villages du Kurdistan. Ils ont commis les pires massacres que vous pouvez imaginer. La Turquie dit être un pays démocratique. La Turquie dit respecter les droits des minorités et les droits des Kurdes, mais ce n’est pas vrai. Je suis sûr que vous avez du mal à croire tout ce que je vous raconte, mais ce que je vous raconte est vraiment ce qui se passe dans ce pays. Pour en revenir à l’Europe, je suis confus quand je pense à sa politique, parce que je n’arrive pas à comprendre comment est-ce que, tout en sachant ce sui se passe (parce que l’Europe n’est pas aveugle), l’Europe peut fermer les yeux. On ne demande même pas à ce qu’elle nous tende la main. Mais comment peut-elle fermer les yeux à un massacre pareil. Comment peut-elle faire mine d’ignorer ce qui se passe sur place, alors que le monde entier est au courant. Est-ce que quelqu’un va dire un jour stop à ce massacre ? Est-ce que quelqu’un, un jour, va nous tendre la main ? Je m’adresse à vous, mais pas seulement. Je m’adresse au monde entier en disant ça. Que faites-vous pour arrêter ce massacre ? Et l’Europe, comme si cela n’était pas assez de faire ceux qui ignorent ce qui se passe, a le culot d’inviter la Turquie en Europe, en lui disant de régler tel ou tel problème, alors qu’elle sait très bien que ce n’est pas la bonne solution. Cela ne se passera pas comme ça. C’est l’Europe qui doit mettre la main à la pâte. »

« La Turquie dit avoir fait un changement constitutionnel qui autorise de parler le kurde en public ou dans la vie quotidienne. Mais ce n’est pas vrai. Je vous donne l’exemple du congrès du DEHAP de notre district, qui s’est tenu la semaine dernière. Une vieille maman kurde a voulu parler à la tribune. Elle s’est présentée à la tribune et a commencé à parler en kurde. Le commissaire en chef, qui était là pour écouter ce qui se passait au congrès, l’a arrêté en lui disant qu’elle n’avait pas le droit de parler en kurde. Elle n’a pas dit qu’elle avait le droit ; elle a seulement dit " c’est la seule langue que je connais, et j’ai des choses à dire ". Il lui a répondu " si c’est la seule langue que tu connais, fais-toi traduire par quelqu’un ou tu ne parles pas du tout ". Alors, où est le changement dans la constitution ? Le monde entier ne voit-il pas que ce qui est écrit sur le papier et la réalité comportent une grande différence. Les représentants de la Turquie vont en Europe pour dire que tout va bien ici. Ils disent que la Turquie a changé, qu’elle est devenue différente, qu’il y a eu des évolutions. Mais la Turquie n’a rien changé du tout. Elle continue sur la même voie et sur la même politique. Je ne comprends toujours pas pourquoi le monde ne bouge pas. Tout ce qu’on demande est qu’on puisse nous donner des droits et qu’on crée un milieu dans lequel on puisse vivre en paix. On ne veut pas la guerre. C’est clair que ce n’est pas ce qu’on demande ni qu’on a envie de faire. Si je paie mes impôts dans ce pays, si je vais faire le service militaire pour les turcs, alors je devrais avoir un traitement comme un citoyen turc. J’ai plus de quarante ans aujourd’hui et je n’ai toujours pas vécu un jour en tant qu’être humain dans ce pays. Je sais que pour moi, il n’y a plus rien à faire. Je n’ai pas d’espoirs pour la période où je serai sur cette terre. Mais tout ce que je demande, et toute cette lutte, c’est pour que mes enfants aient ces droits que je n’ai pas réussi à avoir. Que mes petits-enfants aient le droit de parler leur langue, qu’ils aient le droit de vivre leur identité en paix. Car je suis conscient du fait que tout ce que je vous raconte, c’est peut-être incroyable pour vous, parce que c’est la première fois que vous venez, et que vous ne vivez pas directement ce qui se passe. Mais aujourd’hui, vous avez vu le camp d’Ayasma. Tous ces gens qui sont là-bas, qui vivent dans des taudis où même les chiens ne vivraient pas, s’ils en sont arrivés là aujourd’hui, c’est qu’il y a une raison. Personne ne quitte son pays, personne ne quitte son village, ne quitte ses propres terres (ce qui est très important pour les Kurdes) pour vivre comme des animaux dans des trous que vous avez vus aujourd’hui. Imaginez la vie qu’ils ont à Istanbul, ici. Si elle est difficile comme ça à Istanbul, imaginez la vie qu’ils ont au Kurdistan, alors qu’ils n’ont personne pour le voir. »

Question : « Nous avons bien compris que votre combat est un combat pour la dignité, un combat pour le droit de chacun de vivre comme il est. Votre lutte ne s’exerce pas seulement contre les exactions que subissez, mais aussi pour construire un monde nouveau. Quelle nouvelle société voulez-vous construire ? Et de quelles luttes dans le monde vous sentez-vous proche ? Des palestiniens, des militants d’Afrique du Sud, du Timor Oriental, des Indiens du Chiapas, des Tchétchènes, ... ? »

« Je vois tout simplement le futur comme quelqu’un qui a le droit de vivre humainement. C’est tout ce que je demande. Quelqu’un qui a le droit de s’exprimer. Quelqu’un qui a tout simplement le droit d’être ce qu’il est, de développer sa culture et d’avoir le droit de parler sa langue. Nous voulons notre dignité humaine. Ce sont nos revendications principales. C’est pour en arriver là que je lutte. Si nous avons ces aspirations pour l’avenir, c’est que ces libertés nous ont tellement manquées jusqu’à présent, que c’est avec ce rêve-là que nous continuons à lutter. Pour revenir à l’exemple de quel peuple ou de quelle lutte nous sentons-nous le plus proche, il n’y en a pas en particulier. Je dirais que nous sommes tout simplement proches de toutes les luttes, qu’elles soient nationales ou politiques, du moment qu’elles ne soient pas anti-démocratiques ou fascistes, et qu’elles soient dans le cadre du respect de l’être. Je les respecte toutes, dès l’instant qu’elles sont socialistes, dès l’instant qu’elles sont démocratiques, du moment qu’il s’agit de la lutte d’un peuple opprimé. Tous ces peuples opprimés luttent pour retrouver une dignité perdue. Je voudrais seulement préciser que le PKK lutte, mais qu’il n’y a pas seulement le PKK. Ne restant pas dans le cadre du PKK, mais parlant plus généralement de la lutte du peuple kurde, c’est une lutte qui n’existerait pas si nous n’avons pas l’amour qu’on a en nous pour l’Être. Parce que c’est cet amour en l’Être qui nous donne le courage, qui nous donne une raison d’exister. »


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