PARIS (AFP) - Les militants exigeant la libération des ex-membres du groupe terroriste Action directe (AD), "plus anciens prisonniers politiques de France", accentuent leur mobilisation par une campagne de "sensibilisation" et un "meeting de solidarité" prévu vendredi à Paris.
Ce rassemblement organisé par le collectif "Ne laissons pas faire" (NLPF) réunira notamment à la Bourse du travail les Verts, le Parti communiste, Lutte ouvrière, la CGT et SUD.
Le collectif a par ailleurs lancé samedi à Marseille une "campagne nationale de sensibilisation". Des manifestations sont programmées dans les prochaines semaines à Saint-Etienne, Toulouse et Montpellier.
Cinq anciens membres du groupe d’extrême gauche sont toujours en prison. Jean-Marc Rouillan, Nathalie Ménigon, Georges Cipriani et Joëlle Aubron, condamnés pour l’assassinat de l’ingénieur général René Audran en 1985 et du PDG de Renault Georges Besse en 1986, ont effectué 17 ans de prison.
Le cinquième, Régis Schleicher, est incarcéré depuis vingt ans.
"Nous sommes à un tournant", a déclaré à l’AFP Alain Pojola de NLPF. "Après le refus clair et net de libérer Nathalie Ménigon, nous avons eu beaucoup de retours. On n’a plus le droit de traîner".
La juridiction nationale de libération conditionnelle (JNLC), composée de magistrats de la Cour de cassation, a refusé le 9 avril de libérer pour des raisons de santé par Nathalie Ménigon.
Cette dernière, âgée de 47 ans, a été condamnée à deux reprises à la réclusion criminelle à perpétuité. Elle est partiellement hémiplégique après deux accidents vasculaires cérébraux.
Elle et Georges Cipriani, qui a fait plusieurs séjours en hôpital psychiatrique, n’ont pas obtenu de suspension de peine au titre de la loi Kouchner, qui concerne les détenus gravement malades.
Joëlle Aubron, opérée d’une tumeur au cerveau et d’une santé "très préoccupante" selon son avocat Antoine Ripert, attend quant à elle la décision de la juridiction de libération conditionnelle le 3 mai.
"L’Etat a fait de leur non-libération un symbole", affirme Jean Alfen, un ex-militant d’Action directe. "On veut les faire sortir de prison entre quatre planches".
"C’est une vengeance politique", ajoute Hellyette Bess, une autre ancienne d’AD. "Les personnes qui ont travaillé au service de l’Etat ne sont pas traitées de la même manière".
Malgré la mobilisation, certains avocats des prisonniers sont pessimistes. "Je suis extrêmement sceptique", confie Etienne Noël, l’un des avocats de Jean-Marc Rouillan. "Je me méfie beaucoup de la capacité de l’opinion publique à se mobiliser sur des cas comme cela".
Pour Jean-Louis Chalanset, défenseur de Nathalie Ménigon, la mobilisation actuelle "peut agir sur la libération, mais ça va être difficile".
Me Noël estime qu’il y a "deux poids deux mesures", en citant les libérations obtenues par Maurice Papon et l’ex-PDG d’Elf Loïk Le Floch Prigent.
Pourtant, selon Me Ripert, "la vengeance a assez duré". Les prisonniers d’AD sont "les plus anciens prisonniers politiques de France. Même les prisonniers de l’OAS n’en ont pas fait autant. Si ça continue, Régis Schleicher va battre le record historique des 26 ans de Mandela".
Le PCF et les Verts exigent simplement l’application de la loi Kouchner. "La loi doit être la même pour tous", souligne la député écologiste Martine Billard.
"Nous ne voulons pas nous limiter aux militants d’Action Directe. La loi Kouchner est bonne. Il faut l’appliquer", renchérit Henri Malberg, responsable de la commission justice du PCF.