PARIS (AFP) - Dépressive, malade, l’ancienne membre d’Action Directe (AD) Nathalie Ménigon, emprisonnée depuis 17 ans, a demandé à être libérée pour être soignée, dans un enregistrement téléphonique rendu public lundi par ses amis.
Partiellement hémiplégique après deux accidents vasculaires cérébraux, atteinte d’une "dépression évidente" selon son avocat, et sortant d’une grève de la faim de 10 jours, la détenue - emprisonnée à la centrale de Bapaume (Pas-de-Calais) -, décrit dans cette conversation téléphonique avec un ami son état "lamentable".
"Je peux plus rester comme ça (...) J’ai tellement de trucs à soigner qu’ils ne savent pas par où commencer", déclare Nathalie Ménigon. "Je suis migraineuse. Je ne supporte pas la lumière, j’ai très mal à la tête, je vomis", ajoute la prisonnière, 47 ans, dont une demande de suspension de peine doit être examinée le 26 mars.
Selon un membre d’un collectif de soutien aux prisonniers d’AD, Alain Pojolat, qui a rendu visite à Nathalie Ménigon samedi, la prisonnière a fait une tentative de suicide la semaine dernière.
"Le seul truc, c’est de me libérer (...) Mais ils ne veulent pas me libérer", dit-elle.
Son avocat, Me Jean-Louis Chalanset, a confirmé que les chances d’obtenir une suspension de peine pour sa cliente était "extrêmement minces".
"La loi du 4 mars 2002 sur la possibilité de suspension de peine pour raisons de santé exclut les maladies psychiatriques et psychologiques. En outre, le procureur général s’oppose à sa mise à liberté en invoquant un hypothétique trouble à l’ordre public", a-t-il dit.
"Ils préfèrent libérer Papon, ce serviteur de l’Etat qui a envoyé 1.680 juifs à la mort. Mais pour eux, ça ne compte pas. Pour eux, c’est du passé", poursuit Mme Ménigon.
Le parallèle avec le cas de Maurice Papon, condamné pour complicité de crimes contre l’humanité, et qui a bénéficié en septembre 2002 d’une suspension de peine en raison de son âge et de son état de santé, a été établi par plusieurs participants à la conférence de presse.
"L’égalité de traitement est une condition de la justice", a souligné Henri Malberg, de la commission justice du Parti Communiste.
"La justice française s’honorerait à trouver une solution", a-t-il dit.
Le collectif "Ne laissons pas faire" a organisé un rassemblement lundi soir devant l’administration pénitentiaire. Une petite centaine de personnes ont notamment scandé : "Reprenez Papon, rendez-nous Ménigon !" et "non à la mort lente en prison".
Nathalie Ménigon a été condamnée en janvier 1989 à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté de 18 ans, notamment pour l’assassinat du général René Audran, en janvier 1985, et celui du PDG de Renault, Georges Besse, en novembre 1986.
"L’aventure de la lutte armée, pour nous, elle est terminée. Ca a été une aventure passionnante et on ne regrette rien", déclare encore Nathalie Ménigon.
Les autres membres historiques d’Action Directe, Jean-Marc Rouillan (fondateur d’AD), et Joëlle Aubron sont incarcérés. Le quatrième, Georges Cipriani, a été transféré en 2001 dans un hôpital psychiatrique.