PARIS (Reuters) - La cour d’appel de Paris refuse de remettre à l’Espagne Jean-François Lefort, un Français soupçonné de complicité avec l’ETA, confirmant ainsi une jurisprudence restrictive sur le mandat d’arrêt européen. Un juge antiterroriste de Madrid souhaitait entendre Jean-François Lefort, 34 ans, en tant que "responsable principal en France d’Askatasuna", une structure qui s’occupe des détenus indépendantistes basques. La cour a refusé de suivre le parquet général qui était favorable à l’exécution du mandat d’arrêt. Elle a suivi une jurisprudence établie le 9 juillet dernier par la Cour de cassation dans une procédure similaire visant trois Français militants de l’organisation de jeunesse basque Segi, interdite en Espagne. La Cour de cassation avait alors estimé impossible de remettre des citoyens français à une justice étrangère lorsque les faits dénoncés avaient été "commis en tout ou en partie sur le territoire français". La procédure du mandat d’arrêt européen a remplacé l’an dernier l’extradition. Elle a été conçue pour accélérer les procédures et élargir la coopération. Auparavant, la France excluait avant tout examen les demandes d’extradition de ses nationaux et celles qui concernaient des faits commis sur son territoire.
Dans l’affaire Lefort, le parquet avait estimé à l’audience que le mandat d’arrêt européen imposait par nature de "faire confiance aux juges espagnols, même pour juger un Français et même pour juger des faits commis en France". Jean-François Lefort est écroué en France depuis décembre dans une autre affaire où il est soupçonné d’avoir participé à l’hébergement du n°1 présumé de l’ETA, Mikel Albizu, dit "Antza". Il est mis en examen pour "association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste". Askatasuna ("Liberté" en basque), tolérée en France, a été déclarée illégale par un tribunal d’instruction espagnol en février 2002 et classée comme terroriste par l’Union européenne. Selon Madrid et Bruxelles, elle collecte des fonds et soutient le "complexe ETA".
Un feu vert de la chambre de l’instruction aurait pu entraîner une vague de demandes similaires de Madrid, car les juges espagnols ont engagé une nouvelle stratégie contre l’ETA, déclarant illégaux le parti Batasuna et des mouvements considérés comme ses satellites. Cette stratégie a obtenu un certain succès avec une baisse notoire des activités de l’ETA.