lundi 10 avril 2006, 19h46
CALAIS (AP) - A la demande de la préfecture, la police a procédé le week-end dernier à l’évacuation d’un bois où près de 200 migrants avaient l’habitude de se réfugier la nuit, dans une zone industrielle proche du port de Calais (Pas-de-Calais). Lundi, les employés municipaux de la ville ont commencé lundi à détruire et enlever les abris.
Le bois de Garennes, surnommé localement la "jungle", rassemblait une trentaine d’abris fabriqués de bric et de broc, à l’intérieur desquels les migrants dormaient par petits groupes, entre deux tentatives pour rejoindre clandestinement la Grande-Bretagne.
Depuis la fermeture du centre de Sangatte en décembre 2002, ils en avaient fait leur principal lieu de refuge, durant la nuit. Les employés municipaux de la ville ont commencé lundi à détruire et enlever les abris. La veille, sous la surveillance de plusieurs dizaines de CRS, les migrants ont pu néanmoins pu récupérer leurs effets personnels et en particulier leurs couvertures.
Cette opération fait suite à une vague massive d’interpellations qui a vu 99 migrants interpellés jeudi dernier dans ce même bois. "Nous avons agi sur réquisition du procureur de la République de Boulogne-sur-Mer", a expliqué à l’Associated Press Patrick Espagnol, sous-préfet de Calais, qui a cité des raisons humanitaires à cette évacuation policière.
"Nous ne pouvions laisser les migrants vivre des conditions aussi déplorables", a-t-il dit. "Chaque personne interpellée a été placée en centre d’hébergement, dans divers départements de France. Et nous comptons sur cette période de repos qui leur est offerte pour les aider à faire le point sur leur parcours de migration et les informer des solutions administratives qui leur sont offertes".
Une vision que ne partagent évidemment pas les membres de C’Sûr, un collectif d’associations venant en aide aux migrants. Hélène Vantorre, de l’association Salam, a dénoncé une "opération cruelle et inutile". "On vide le bois et on détruit leurs abris tout en les laissant s’installer à quelques dizaines de mètres de là", constate-t-elle. Et d’ajouter : "Dès qu’ils sont lâchés dans les centres d’hébergement, ils s’échappent et reviennent à Calais, épuisés, parce que la Grande-Bretagne reste leur seul et unique objectif".
Historiquement, les migrants sont des Kurdes irakiens, des Afghans et des Iraniens. Mais depuis l’été 2005, un nouveau flux vient de la Corne africaine, drainant des populations de Somalie, du Soudan et d’Erythrée. "Les tensions ethniques et les incidents qui se multipliaient entre Africains et Kurdes, à Calais, sont également l’une des raisons qui nous a poussé à agir", a assuré M. Espagnol.
En 2005, 22.000 migrants ont été interpellés dans le secteur de Calais, selon la préfecture du Pas-de-Calais. Un chiffre en hausse de 13%, par rapport à l’année précédente. Nicolas Sarkozy, lors d’une visite sur place fin octobre, avait annoncé le renfort des moyens policiers et promis de refaire un point de la situation, trois mois après. Sa visite n’est, à ce jour, toujours pas annoncée.