Kurdistan Est (Infokurd)
Au lendemain du passage de l’Empire d’ottoman, les Kurdes d’Iran essaieront aussi de participer aux revendications kurdes pour la création d’un Etat indépendant unifié. Simko, chef de la tribu Chikak organise un grand soulèvement et prend sous son contrôle, de 1920 à 1925, tout le nord du Kurdistan d’Iran. Demandant l’indépendance de tout le Kurdistan, il tente de se mettre en rapport avec la révolte de Cheikh Mahmoud qui se déroule au même moment au Kurdistan irakien. En 1925, par un coup d’état soutenu par les Anglais, Reza Khan, fondateur de la dynastie des Pahlavi s’empare du pouvoir. Le 21 juin 1930, Simko est invité à Téhéran pour négocier avec le régime. Il y sera assassiné. Privé de son chef, le mouvement s’effondre rapidement.
Reza Khan s’applique à renforcer son pouvoir en brisant celui des chefs de tribus kurdes et à créer un Etat centralisé. Il sévit durement pour prévenir toutes revendications, de peur qu’elles ne se transforment en pépinières du nationalisme kurde : déportation et arrestation de plusieurs dizaines de chefs de tribus, interdiction de toutes les organisations et associations sociales ou culturelles, et des publications en kurde. Il réprime dans le sang des rébellions locales dont celle de Jafar Sultan qui éclatera en 1931 au sud du Kurdistan iranien.
En 1934, lors de la visite qu’il rend en Turquie, il jette les bases d’une étroite coopération entre Téhéran et Ankara pour la lutte contre les tribus kurdes récalcitrantes. Parallèlement à la répression, Reza shah prend des mesures économiques et sociales pour saper les bases d’un éventuel mouvement séparatiste. Il confisque des terres, déporte des tribus entières dans des régions où elles ne peuvent exercer une quelconque influence. Mais comme les événements allaient se charger de le démontrer, Reza shah ne parvient ni à détruire les structures sociales ni à étouffer dans l’ ?uf le mouvement national kurde.
La Seconde Guerre mondiale donnera l’occasion aux Kurdes de s’exprimer à nouveau sur le plan politique. Dans un Iran occupé, par les armées alliées, pour cause d’alliance avec le régime nazi d’Allemagne, les Kurdes fondent leur première organisation politique, Komala. Celle-ci donnera lieu trois ans plus tard, en août 1945, à la création du Parti Démocratique du Kurdistan (PDK) qui revendique principalement une large autonomie culturelle.
Profitant de l’absence d’une autorité centrale dans l’Iran occupé, les Kurdes créent en janvier 1946, une République qui sera le seul Etat kurde de toute l’histoire du Kurdistan. Des Kurdes de toutes les parties du Kurdistan viendront se mettre au service de cette république. L’un d’entre eux, Moustafa Barzani à la tête de plusieurs centaines de combattants en révolte depuis de nombreuses années contre le gouvernement irakien, sera nommé chef d’état-major de l’armée kurde. Mais l’existence de cet Etat kurde sera éphémère. Après une brève existence de quatorze mois au cours desquels de nombreuses revendications historiques du peuple kurde seront réalisées, la République est écrasée par l’armée du Shah appuyée par les forces anglo-américaines. Son président est pendu sur la place publique de la vile de Mahabad le 13 mars 1947.
De 1946 jusqu’en 1979, pendant 33 ans, le peuple kurde a poursuivi son combat dans la clandestinité. Une révolte dirigée par le PDK, en 1967, et qui dura 18 mois est écrasée à son tour et la majorité de ses dirigeants exécutés.
Après la prise du pouvoir par les islamistes en février 1979, les Kurdes prennent sous leur contrôle tout le territoire kurde en Iran. Le Secrétaire général du PDK est élu par l’immense majorité de la population à l’Assemblée générale des experts pour y élaborer la nouvelle Constitution de l’Iran. Il devait être le seul député laïque. Mais Khomeiny refuse la notion même d’opposition, déclare l’élection nulle et le 19 août 1979 déclare la guerre sainte contre le peuple kurde.
Des négociations entre les représentants du gouvernement et une délégation kurde se poursuit durant 6 mois sans aboutir au moindre résultat. Les autorités de Téhéran refuse de reconnaître les revendications légitimes du peuple kurde.
Les élections au premier parlement de la République ont lieu à la fin de 1979. Le gouvernement fait bloquer les élections dans le sud du Kurdistan. Dans toutes les autres régions du Kurdistan les candidats présentés généralement par le PDK sont élu à 80 % des suffrages exprimés et pourtant aucun des élus n’est admis au parlement.
Désignés par Khomeiny comme « fils de Satan » et « agents de l’impérialisme », la « guerre sainte » est déclarée en mars 1980, contre les Kurdes et leur pays. Cette guerre qui ne s’est jamais arrêtée depuis cette date fera plus de 60 000 victimes parmi les civils sans compter les quelques 5 000 combattants kurdes morts aux combats. Plus de 300 villages seront détruits et leur population déportée. Des milliers de personnes seront emprisonnées et exécutées sommairement.
Le gouvernement islamique pratiquera cette terreur à l’extérieur même de ses frontières. Ainsi en juillet 1989, le Secrétaire général du PDK, Ghassemlou, invité à Vienne en Autriche par les émissaires iraniens pour trouver un règlement politique à la question kurde, sera assassiné à la table de négociation par ces mêmes émissaires munis de passeport diplomatique. Trois ans plus tard, en septembre 1992, le remplaçant de Ghassemlou et trois de ses compagnons seront abattus, dans les mêmes circonstances, à la table d’un restaurant à Berlin par des tueurs venus encore une fois de Téhéran. Des camps de réfugiés kurdes iraniens au Kurdistan d’Irak seront régulièrement bombardés par l’artillerie et l’aviation de Téhéran. Son armée se permettra même d’envahir en juillet 96 le Kurdistan irakien - où des agents iraniens avaient déjà assassiné des dizaines de cadres du PDK - et provoquera l’exode de plus de 4 000 réfugiés kurdes iraniens vivant depuis de nombreuses années dans cette région.
Ces graves violations des droits de l’homme, commises par les autorités iraniennes dans cette partie du Kurdistan soumise depuis 1979 à un état de siège permanent, contraindra beaucoup de Kurdes à l’exil. Plusieurs centaines de familles vivent dans des camps de réfugiés au Kurdistan d’Irak. Des dizaines de milliers d’autres se sont réfugiés en Turquie et dans les pays occidentaux notamment en Allemagne, en Suède et aux Pays-Bas. La France compte aussi quelques centaines de familles exilées.